Trio

pour piano, violon et violoncelle en mi mineur. Opus 18.

Composition : mai 1904 – mars 1905.

Création : 19 janvier 1906, à Paris Salle Aéolian, par le Trio Parent (Armand Parent, Louis Fournier, Marthe Dron).

Dédicace : Paul Poujaud.

Édition : par l’auteur, décembre 1906 ?

Présentation

  1. Sombre
  2. Chantant
  3. Scherzo. Vif (temps de valse)
  4. Finale

Le Trio avec piano en fa mineur, terminé en mars 1905, a été commencé l’été précédent, juste au moment où Magnard, « poursuivi par les maisons à 6 ou 7 étages, et à quadruples dômes en casque de prussiens, écœuré par les concierges, les domestiques, les sixièmes, etc… », selon ses propres mots, a « lâché Paris », et vient de s’installer dans l’Oise, à Baron, dans un manoir campagnard qui sera sa résidence définitive, celle où il trouvera cette mort héroïque qui aura tant (trop ?) fait pour la célébrité du compositeur. Toujours aussi impitoyable envers lui-même qu’envers les autres, il trouvait le premier mouvement trop court, et le finale trop long.

Le mouvement initial, est intitulé Sombre, indication qui correspond au premier thème, orageux et emporté, tandis que le second thème, intitulé Clair, est beaucoup plus détendu et sensible ; dans ce mouvement, en effet rude de brièveté, Magnard pousse au maximum, jusque dans les indications elles-mêmes, l’opposition typiquement beethovénienne entre les deux thèmes de la forme-sonate. Le mouvement lent, Chantant, particulièrement développé, tient en même temps du lied et de la variation amplificatrice ; alternant avec beaucoup de subtilité sérénité et drame, il est savamment construit autour de deux motifs, imbriqués l’un dans l’autre. Le scherzo, Vif (temps de valse) apporte une légèreté bienvenue, toutefois assez relative ; là encore, deux thèmes, celui de la valse, gracieux et capricieux, exposé au violon, et un thème très mélodique, un peu sombre, exposé au violoncelle, s’opposent. Il s’enchaîne avec le Finale, en effet très long, mais dont l’introduction, qui trouvait, elle, grâce aux yeux du compositeur, est particulièrement originale, avec ses généreux récitatifs (Largement) interrompus par de courts et brusques épisodes (Vif), qui débouchent sur une exposition de fugue. C’est alors le thème principal (Double plus vif), qui pendant un assez long temps, avec toutefois quelques épisodes plus mélodiques, va permettre à Magnard de montrer toute sa verve rythmique ; le deuxième thème (Large) est une longue phrase déclamée au violon, vite interrompue, encore une fois, par un Vif qui s’enivre de son propre rythme, et qui mène à une double-fugue magistrale, cœur du développement, et dont une merveilleuse accalmie (Double plus lent) met fin. La réexposition apporte de plus en plus de douceur, et finit par l’emporter, dans ce Trio qui nous aura confronté à beaucoup de drame et de violence.

Dans la Correspondance (lettre à Paul Poujaud, du 8 juillet 1905) :

« Je suis content que le trio vous ait plu, et content doublement puisqu’il vous est dédié. Le premier mouvement est peut-être trop concis et le finale pas assez. Ce serait là un défaut assez grave d’équilibre entre le commencement et la fin. Je suis étonné que le prélude du finale ne vous ait pas satisfait. C’est, à mon avis, la seule page de forme et d’expression nouvelles que j’ai écrite dans ce trio. »